samedi 30 avril 2011

Funérailles bis


En moins de 5 jours deux funérailles. Lundi dernier, je faisais parti de la distribution des funéraillés, et hier, les vedettes étaient les membres de la famille d’une collègue haïtienne qui travaille dans un autre projet canadien. Grosso-modo, même messe (en français !) à 4 heures d’avion de distance. Je parle des étapes et des grandes prières bien évidement. Je parle aussi de la qualité des musiciens et chanteurs. Je parle surtout de la même peine dans les yeux rougis. Pour le reste, quelques heures supplémentaires de distance … Si pour les funérailles de mon père, le décédé et ses proches ont été le point central de l’événement, le focus en Ayiti était nettement moins ‘personnalisé’, davantage fixé sur la cérémonie en soi, sur sa dimension religieuse. Chez nous, le curé a parlé abondement de Bob, une petite-fille, deux tantes et moi (pour la fratrie) avons été appelés à lire des textes ‘personnels’ en hommage à Bob. Des lectures spécifiques religieuses de la cérémonie ont été faites par un petit-fils, ma sœur et un de mes frères. Le curé a réuni les enfants et les petits-enfants deux fois autour de lui pour distribuer des fleurs et bénir la tombe. Disons simplement qu’il y a eu du mouvement et que le décorum religieux semblait moins présent, que le curé avait partagé la vedette. En fait, comme si la religion jouait le rôle de second violon pour mettre davantage les projecteurs sur les gens directement touchés. Hier à l’Église Saint-Pierre, je me suis retrouvé dans un environnement plus serein (dans le sens de moins ‘actif’), davantage centré sur le message religieux de l’événement. Une cérémonie nettement moins arrosée de l’individualité de la mort. À l’inverse de ce qui s’est passé lundi, où la religion en fait, joue le premier violon. Le curé en tête d’affiche. Je ne sais pas trop si c’est simplement ma distance émotive avec l’événement qui m’a fait observer ces dissemblances, mais j’imagine aisément les haïtiens difficilement capables de se donner préséance sur le Bon Dieu, ou du moins vouloir prendre une place aussi significative que lui. Ça me rappelle la réaction du chauffeur le lundi matin où on se préparait à quitter d’urgence pour le Canada. Comme à tous les matins, il m’avait demandé comment j’allais et je lui avais répondu que j’étais pas mal ‘tèt chaje’, que je venais d’apprendre que mon père allait mourir. Il avait sursauté (un peu vexé même) que j’ose annoncer la mort de mon père, alors que seul Dieu a cette capacité. ‘Mèm bagay’ pour les funérailles.

4 commentaires:

Anonyme a dit…

Chez les Haïtiens occidentalisés, comme dans la famille de ta collègue, le Bon Dieu occupe une place comparable à celle qu'il occupait au Québec il y a cent ans. Mais dans les campagnes, c'est le vaudou qui prédomine et les gens ont une attitude extraordinaire face à la mort: la vie et la mort ne sont pas deux états distincts, ils cohabitent, on passe de l'un à l'autre et le mort continue à vivre parmi les siens. La mort est l'occasion de faire la fête et des événements, comme le décès d'un enfant, dont les blancs ne réussissent à peu près jamais à se relever ne sont pas ici aussi traumatisants.

Anonyme a dit…

Ce qu'il y a de merveilleux en Haïti, c'est la culture de l'élite, bien plus raffinée que celle des blancs, et la culture du peuple des campagnes, merveilleusement riche et parfaitement étrangère à la nôtre. Paradoxalement, on travaille à développer la classe moyenne et donc à détruire ce qui constitue la véritable richesse du pays. Mais c'est ce que font les blancs partout où ils passent. Je pense souvent à cette phrase du général de Gaulle: "Le bonheur c'est pour les idiots"

Anonyme a dit…

Pour continuer avec De Gaulle, une autre phrase du général (mais qui n'a aucun rapport avec la précédente): "Pour tous ceux qui n'ont pas réussi, gâcher le bonheur des autres, c'est réussir un peu". Ce pourrait être la devise de la fonction publique haïtienne (ou du pays).

Anonyme a dit…

Pour continuer avec les citations sur le bonheur, Rivarol disait "Il ne suffit pas d'être heureux, encore faut-il que les autres ne le soient pas". Cela constitue probablement la motivation inconsciente fondamentale de l'implication du blanc dans le tiers-monde (sauf pour toi et moi évidemment).