mardi 8 juin 2010

Fermez vous les yeux, on part !


Il y a deux semaines à Jacmel, une communauté religieuse américaine distribuait des poupées toutes symboliques aux enfants d'une école. À la fin de la distribution, on a demandé aux enfants de se fermer les yeux pour faire une prière. Ce petit bonhomme, fervent croyant, se fermait les yeux avec intensité. Quand c'est la prière qui gouverne, peut-être peut-on se fermer les yeux et faire confiance !? J'ai repensé à lui aujourd'hui en lisant les nouvelles de la rencontre de la CIRH (Commission intérimaire pour la reconstruction d'Haïti) qui a eu lieu à Punta Cana la semaine dernière : On se ferme les yeux et on avance ! 5,3 milliards à dépenser en 24 mois. J'ai essayé sur ma calculatrice de connaître combien de millions par mois on allait être invité à dépenser, mais je me suis aperçu que j'étais incapable d'écrire 5,3 milliards en chiffre, il y a trop de zéro, je m'y perds. Le plus absurde pour moi, est cette absence de vision, cette absence de plan… 5,3 milliards pour reconstruire quoi au juste ? Pour atteindre quels objectifs ? Je sais, toutes les priorités du gouvernement ayisien sont dans un plan présenté à NY il y a quelques mois, mais un plan qui ressemble davantage à une liste d'épicerie qu'à une stratégie de développement d'un pays. Combien a-t-on vraiment eu pour définir ce document ? Deux mois !! On pourrait parler ici de lutte contre la pauvreté, de l'accès à l'éducation, de l'accès aux services de santé, de développement économique, du développement de la vie démocratique, il y a tellement à construire (et non pas à reconstruire !). La réorganisation du centre-ville de Potopwins est l'une des absurdités qui me frappe le plus : Je ne peux pas m'imaginer que la communauté internationale et le gouvernement ayisien vont dépenser des centaines de millions en béton et en asphalte pour le reconstruire, sans un plan d'urbanisme. Avant bagay la, tout était bordélique au centre-ville de PAP, construit pour y faire vivre et travailler presque dix fois de moun. Tout devrait être repenser, de la circulation routière aux espaces commerciaux en passant par l'emplacement des édifices à vocation publique (ministères, écoles, hôpitaux, …). Peut-on réellement reconstruire le centre-ville sans avoir un plan pour les aqueducs et la distribution de l'électricité ? Quels moyens allons-nous donner pour consulter les populations touchées et bien arrimer besoins et reconstruction ? Je ne sais par où commence la distribution de chèques, mais j'ose espérer que les premiers permettront de penser, de développer une vision. Aussi bien remettre le volant à des non-voyants !

3 commentaires:

Anonyme a dit…

J'adore ton blogue. Moi aussi, je pense construction et non reconstruction. Ce que tu dis est si juste, même si je n'y suis pas, pour avoir travaillé auprès de gens qui œuvraient dans ces communautés, ici, à Montréal et suivi pas mal d'émission où la diaspora exprimait les mêmes choses que toi.

Je sais que d'habitude tu ne réponds pas et je respecte cela, bien sûr. Tu donnes certainement d'abord et avant tout des nouvelles à tes proches. Cependant, je viens d'apprendre que Monsanto a des plans pour Ayiti. Cette multinationale destructrice et sans aucune espèce d'éthique autre que tout ce qui peut l'enrichir $$$, qui détruit notre planète et rend dépendants à ses technologies de mmm (pardon) les pays les plus démunis. Cela m'écœure au plus haut point. J'aimerais bien savoir si tu peux compléter ces infos, confirmer...

Et j'espère que ta petite famille va bien, y compris ta petite toute petite.

Zed ¦)

ratata a dit…

Moi je pense que je planterais des arbres partout ou de l'espace a été créée par les effondrements; ils auraient le temps de pousser avant que tout soit réorganisé!

Xenos a dit…

Ce n'est même pas construire Ayiti qu'il faut faire, c'est le créer. Le créer, par des Ayisiens pour les ayisiens. Je suis convaincue qu'ils pourraient inventer leur monde. Encore faut il trouver LA personne pour estampiller le fameux document ''projet approuvé et financé''.
Jean François Labadie au risque de me répéter vous faites un excellent travail. Merci.